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La Chine se tourne vers l’Afrique pour s’approvisionner en cuivre… et d’autres ressources

D’abord, c’était l’Amérique latine, aujourd’hui c’est l’Afrique. Quel que soit le site du projet, les investisseurs chinois répondent présents, et l’acquisition récente de la mine de Tenke Fungurume en République démocratique du Congo par des capitaux chinois est le dernier exemple en date d’une tendance de plus en plus marquée.
Confrontée à une chute de sa production nationale, la plus grande société d’extraction de cuivre de Chine — Minmetals — a déclaré que « la seule solution consiste à aller à l’étranger », et beaucoup d’entreprises chinoises lui emboitent le pas.

D’abord, c’était l’Amérique latine, aujourd’hui c’est l’Afrique. Quel que soit le site du projet, les investisseurs chinois répondent présents, et l’acquisition récente de la mine de Tenke Fungurume en République démocratique du Congo par des capitaux chinois est le dernier exemple en date d’une tendance de plus en plus marquée.

La présence chinoise en Afrique

Pays d’Afrique où des sociétés chinoises détiennent des participations dans des exploitations minières, évolution de 2006 à 2015.

La nation asiatique prévoit de mettre la main sur les actifs que d’autres sociétés mettent en vente. La raison ? C’est très simple : la Chine a besoin de s’assurer d’un approvisionnement en métaux, principalement en cuivre et en cobalt.

Malgré une hausse de 3,5 % de la production mondiale de cuivre en 2015, la production chinoise a décliné. La production minière de la Chine, d’une valeur de 1,66 million de tonnes, représente 8,7 % de l’offre mondiale, qui s’élevait à un peu plus de 19 millions de tonnes l’an dernier.

Ces chiffres contrastent avec la demande de cuivre en Chine, dont on prévoit une hausse jusqu’à 46 % de la consommation mondiale de cuivre d’ici 2018.

Ces dix dernières années, le pays a renforcé sa capacité de fusion compte tenu de sa croissance, qui l’amène aujourd’hui à consommer environ 40 % du cuivre mondial. Toutefois, pour ce qui concerne le cuivre brut, la Chine continue de dépendre des mines à l’étranger.

Ratio R/P (« taux de combustion ») de la Chine par rapport au R/P moyen mondial, en années. Sources : compilation de rapports de l’USGS, de BP et de pays, et d’autres.

« Les ressources de cuivre en Chine sont très faibles », a indiqué Jerry Jiao, vice-président de China Minmetals, le plus grand négociant de métaux du pays, à l’occasion de la Conférence mondiale du cuivre qui s’est tenue au début du mois d’avril 2016 à Santiago au Chili. « La seule solution pour s’assurer d’une offre stable des ressources en cuivre consiste à aller à l’étranger ».

Minmetals est propriétaire de la grande mine Las Bambas au Pérou, qui a commencé à écouler sa production de cuivre cette année. Selon M. Jiao, la société a convenu de vendre le concentré de cuivre provenant de la mine à une unité locale du groupe Citic, une entité d’État de la Chine.

La société fait partie des nombreuses entreprises qui ont des vues sur les actifs étrangers. En mai 2016, China Molyddenum (CMOC) a signé un accord d’une valeur de 2,65 milliards de dollars avec Freeport en vue d’acquérir sa plus grande mine cuprifère en Afrique — Tenke Fungurume.

Si le projet se concrétise, la transaction constituera l’une des plus grosses ventes forcées dans l’industrie minière, après un ralentissement marqué du cours des matières premières qui a poussé plusieurs sociétés à prendre des mesures drastiques pour consolider leur bilan comptable.

Il s’agirait alors de la deuxième plus grande acquisition réalisée en l’espace de deux semaines par la société, qui, plus tôt dans l’année, avait indiqué qu’elle souhaitait étendre sa présence mondiale et s’y était engagée peu après, en convenant d’acheter des actifs brésiliens auprès d’Anglo American, un autre exploitant minier présentant un niveau d’endettement énorme de 1,5 milliard de dollars.

Des vues sur le cobalt et l’or également

La vente de la mine Tenke Fungurume constituerait le plus vaste investissement privé de toute l’histoire de la RDC, et les analystes suggèrent que, à travers cet accord, non seulement la Chine cherche à garantir son approvisionnement en cuivre, mais aussi à acquérir une part du marché du cobalt, car les matières premières sont essentielles pour développer des batteries de voitures électriques.

Évolution des principaux actifs d’exploitation minière/de traitement de minerais en Afrique avec une participation de sociétés basées en Chine, en nombres cumulés. Source : IntelligenceMine.

L’accord conclu sur Tenke démontre également comment la Chine, où la demande en actifs miniers étrangers demeure forte, bénéficie de l’affaiblissement des positions de négociation de certains vendeurs pour acquérir des ressources à bas prix.

Une fois que la transaction sera finalisée, les sociétés chinoises assureront environ 62 % de la production mondiale de cuivre raffiné en 2017, selon les estimations de CRU.

Il est prévu que la demande de cuivre augmentera de plus de deux tiers au cours des dix prochaines années.

Zijin, la société chinoise qui peut aujourd’hui se targuer d’être le troisième plus grand producteur d’or, a également assuré une consolidation stable des actifs étrangers. L’an dernier, elle a acheté auprès d’Ivanhoe Mines une participation de 49,5 % dans le projet cuprifère de Kamoa en RDC, pour environ 412 millions de dollars. La société a confirmé qu’elle prévoira d’acquérir plus de sociétés minières, en particulier dans le secteur de l’or et, selon les rumeurs qui circulent, c’est d’abord en Afrique qu’elle envisagerait de démarrer.

Ce n’est là rien de nouveau

À bien des égards, la Chine reproduit une stratégie connue des acteurs de l’industrie minière. Au tournant du millénaire, le pays a pris le parti de garantir ses approvisionnements en produits de base traditionnels, comme le pétrole et les métaux industriels, tantôt par des acquisitions, tantôt par des contrats d’investissement et des prêts pour l’achat de pétrole conclus avec des nations comme l’Angola et le Venezuela, qui disposent de vastes gisements de ces matières premières.

Mais le contrôle qu’a exercé la Chine sur les autres matières premières ces dix dernières années a suscité des préoccupations d’ordre stratégique aux États-Unis et au Japon, après l’imposition de restrictions sur les exportations de métaux de terres rares qui, à l’époque, étaient principalement exploités en Chine.

La production de cobalt en RDC représente plus de 50 % de l’offre mondiale du métal, qui est également utilisé dans les batteries des téléphones intelligents.

La mine Tenke, située dans le sud-est de la RDC à environ 175 km au nord-ouest de la capitale provinciale de Lubumbashi, a produit à elle seule 16 000 tonnes de cobalt l’an dernier. Selon la société, la mine contient des réserves susceptibles de durer pendant 25 ans.

Les experts conviennent que, depuis longtemps, les stratèges chinois considèrent la RDC comme un lieu privilégié permettant à leurs concitoyens d’accéder à des matières premières, dont le cobalt.

En outre, la politique de non-intervention adoptée par la Chine dans le cadre des conflits internationaux lui permet de soumettre des offres pour des actifs qui se trouvent dans des juridictions où, pour des raisons politiques, les exploitants miniers occidentaux n’oseraient pas s’aventurer.

Que la course démarre…

Evelyn Murray

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