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La RDC accuse Apple d’utiliser des minerais provenant de mines congolaises «exploitées illégalement»

FILE PHOTO: Labourers work at an open shaft of the SMB coltan mine near the town of Rubaya in the Eastern Democratic Republic of Congo, August 13, 2019. Picture taken August 13, 2019. REUTERS/Baz Ratner/File Photo

Selon l’État congolais, ces minerais seraient issus de mines où «de nombreux droits humains sont violés», avant d’être «transportés hors de la RDC et notamment vers le Rwanda, où ils seraient blanchis».

L’État congolais accuse le géant Apple d’utiliser dans ses produits des minerais «exploités illégalement» qui proviendraient «de mines congolaises» au sein desquelles «de nombreux droits humains sont violés», selon des documents consultés par l’AFP. Une mise en demeure (sommation avant une procédure judiciaire) a été adressée cette semaine aux deux filiales d’Apple en France par les avocats mandatés par l’État congolais. Un courrier a également été envoyé à la maison mère du géant américain de la tech. Selon ces avocats, ces minerais seraient ensuite «transportés hors de la RDC et notamment vers le Rwanda, où ils seraient blanchis».

«Il ressort du dossier» remis par la RDC «que la société Apple utilise dans ses produits des minerais stratégiques achetés au Rwanda», affirment les avocats mandatés pour rédiger une mise en demeure, sommation avant le déclenchement d’une procédure judiciaire. «Le Rwanda est un acteur central de l’exploitation illégale de minerais et notamment de l’exploitation de l’étain et du tantale en RDC», affirment les avocats. «Après leur extraction illégale, ces minerais sont importés par contrebande au Rwanda, où ils sont intégrés dans les chaînes d’approvisionnement mondiales», affirme la mise en demeure. «Ces minerais litigieux proviendraient en grande partie de mines congolaises au sein desquelles de nombreux droits humains sont violés», poursuivent les avocats.

Cette mise en demeure a été adressée cette semaine aux deux filiales d’Apple en France par les avocats français William Bourdon et Vincent Brengarth. Un courrier a également été envoyé à la maison-mère américaine du géant de la tech qui commercialise notamment l’iPhone et les ordinateurs Mac. Le sous-sol de la RDC regorge de minerais, le pays étant notamment le premier producteur mondial de cobalt et le premier producteur africain de cuivre. Selon un rapport de l’ONG The Enough Project publié en 2015, «ces sites de minerais apparaissent souvent contrôlés par des groupes armés qui contraignent, par la violence et la terreur, des civils à y travailler et à transporter ces minerais. Des enfants sont également forcés à travailler dans ces mines».Le gouvernement de Kinshasa accuse le Rwanda de vouloir faire main basse sur les ressources, minières notamment, de l’Est congolais, une des raisons pour lesquelles, selon lui, Kigali soutient la rébellion du M23, à l’offensive depuis plus de deux ans dans la province du Nord-Kivu. Le M23 contrôle actuellement de larges pans du Nord-Kivu et encercle le chef-lieu de la province Goma. Cette mise en demeure d’Apple s’explique selon ces avocats «par l’extraordinaire gravité de la situation dans l’Est de la RDC et qui est source de très graves dommages à la population locale et à l’État congolais».

«Minerais du sang»

«La responsabilité d’Apple, et au-delà des grands fabricants de high-tech, quand ils utilisent des minerais du sang, est restée depuis longtemps une boîte noire», ont déclaré jeudi à l’AFP les avocats William Bourdon, avocat au bureau de Paris, et Robert Amsterdam, avocat au barreau de Londres. Les avocats estiment «notoirement insuffisants» les «différents engagements et précautions pris» par Apple, «soit d’initiative, soit en application de la loi s’agissant de l’utilisation des minerais achetés au Rwanda».

«La RDC entend moraliser le secteur de l’extraction des minerais rares, surtout quand ils sont extraits au prix de la commission des crimes les plus graves et parfois au bénéfice de ceux qui les commettent», argumentent-ils. «La société Apple semble s’appuyer principalement sur la vigilance de ses fournisseurs et leur engagement à respecter le code de conduite d’Apple, ainsi que les audits externes réalisés sur l’activité de ces fournisseurs. Or, tant ces fournisseurs que les entreprises d’audit apparaissent s’appuyer sur la certification ITSCI dont les dysfonctionnements graves et nombreux ont été démontrés», affirme la mise en demeure.

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La RDC accuse Apple d’utiliser des minerais provenant de mines congolaises «exploitées illégalement»

Par Le Figaro avec AFP

Mis à jour il y a 2 heures

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Selon l’État congolais, ces minerais seraient issus de mines où «de nombreux droits humains sont violés», avant d’être «transportés hors de la RDC et notamment vers le Rwanda, où ils seraient blanchis».

L’État congolais accuse le géant Apple d’utiliser dans ses produits des minerais «exploités illégalement» qui proviendraient «de mines congolaises» au sein desquelles «de nombreux droits humains sont violés», selon des documents consultés par l’AFP. Une mise en demeure (sommation avant une procédure judiciaire) a été adressée cette semaine aux deux filiales d’Apple en France par les avocats mandatés par l’État congolais. Un courrier a également été envoyé à la maison mère du géant américain de la tech. Selon ces avocats, ces minerais seraient ensuite «transportés hors de la RDC et notamment vers le Rwanda, où ils seraient blanchis».

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«Il ressort du dossier» remis par la RDC «que la société Apple utilise dans ses produits des minerais stratégiques achetés au Rwanda», affirment les avocats mandatés pour rédiger une mise en demeure, sommation avant le déclenchement d’une procédure judiciaire. «Le Rwanda est un acteur central de l’exploitation illégale de minerais et notamment de l’exploitation de l’étain et du tantale en RDC», affirment les avocats. «Après leur extraction illégale, ces minerais sont importés par contrebande au Rwanda, où ils sont intégrés dans les chaînes d’approvisionnement mondiales», affirme la mise en demeure. «Ces minerais litigieux proviendraient en grande partie de mines congolaises au sein desquelles de nombreux droits humains sont violés», poursuivent les avocats.

Cette mise en demeure a été adressée cette semaine aux deux filiales d’Apple en France par les avocats français William Bourdon et Vincent Brengarth. Un courrier a également été envoyé à la maison-mère américaine du géant de la tech qui commercialise notamment l’iPhone et les ordinateurs Mac. Le sous-sol de la RDC regorge de minerais, le pays étant notamment le premier producteur mondial de cobalt et le premier producteur africain de cuivre. Selon un rapport de l’ONG The Enough Project publié en 2015, «ces sites de minerais apparaissent souvent contrôlés par des groupes armés qui contraignent, par la violence et la terreur, des civils à y travailler et à transporter ces minerais. Des enfants sont également forcés à travailler dans ces mines».

Le gouvernement de Kinshasa accuse le Rwanda de vouloir faire main basse sur les ressources, minières notamment, de l’Est congolais, une des raisons pour lesquelles, selon lui, Kigali soutient la rébellion du M23, à l’offensive depuis plus de deux ans dans la province du Nord-Kivu. Le M23 contrôle actuellement de larges pans du Nord-Kivu et encercle le chef-lieu de la province Goma. Cette mise en demeure d’Apple s’explique selon ces avocats «par l’extraordinaire gravité de la situation dans l’Est de la RDC et qui est source de très graves dommages à la population locale et à l’État congolais».

«Minerais du sang»

«La responsabilité d’Apple, et au-delà des grands fabricants de high-tech, quand ils utilisent des minerais du sang, est restée depuis longtemps une boîte noire», ont déclaré jeudi à l’AFP les avocats William Bourdon, avocat au bureau de Paris, et Robert Amsterdam, avocat au barreau de Londres. Les avocats estiment «notoirement insuffisants» les «différents engagements et précautions pris» par Apple, «soit d’initiative, soit en application de la loi s’agissant de l’utilisation des minerais achetés au Rwanda».

«La RDC entend moraliser le secteur de l’extraction des minerais rares, surtout quand ils sont extraits au prix de la commission des crimes les plus graves et parfois au bénéfice de ceux qui les commettent», argumentent-ils. «La société Apple semble s’appuyer principalement sur la vigilance de ses fournisseurs et leur engagement à respecter le code de conduite d’Apple, ainsi que les audits externes réalisés sur l’activité de ces fournisseurs. Or, tant ces fournisseurs que les entreprises d’audit apparaissent s’appuyer sur la certification ITSCI dont les dysfonctionnements graves et nombreux ont été démontrés», affirme la mise en demeure.

Le programme Initiative de la chaîne d’approvisionnement de l’étain (ITSCI) est un des principaux mécanismes mis en place il y a plus de 10 ans pour assurer un approvisionnement en minerais «libres de conflit» et extraits de façon responsable en RDC, selon l’ONG britannique Global Witness. En avril 2022, cette ONG avait accusé ce programme de contribuer en RDC au contraire au blanchiment de minerais liés à des conflits, au travail des enfants, ou issus de trafic et de contrebande.

Pour s’approvisionner en étain, tantale et tungstène (les métaux dits «3T», très utilisés dans les équipements électroniques), de grandes entreprises comme Apple, Intel, Samsung, Nokia, Motorola, Tesla, s’appuient sur ce mécanisme «défaillant», a déploré l’ONG, qui avait révélé que «dans une certaine zone minière» de l’est de la RDC, «90% des minerais ayant intégré le programme au cours du premier trimestre 2021 ne provenaient pas de mines validées». La mise en demeure d’Apple par la RDC s’accompagne d’une liste de questions sur les «minerais 3T utilisés dans les produits Apple». Les avocats mettent en demeure Apple d’y répondre «sous trois semaines»«Toutes les options judiciaires sont maintenant sur la table», ont ajouté les avocats.

Contacté par l’AFP, Apple a renvoyé à des éléments publiés dans son rapport annuel de 2023 sur les minerais du conflit. Celui-ci indiquait n’avoir «trouvé aucune base raisonnable pour conclure que l’une des fonderies ou raffineries de 3TG (étain, tungstène, tantale, or) déterminées comme faisant partie de notre chaîne d’approvisionnement au 31 décembre 2023 a directement ou indirectement financé ou bénéficié à des groupes armés en RDC ou dans un pays limitrophe.»

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