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ZLEC : le pari du libre-échange

Pendant que les pays membres de l’Union Africaine lançaient symboliquement, le 7 juillet 2019

Pendant que les pays membres de l’Union Africaine lançaient symboliquement, le 7 juillet 2019, «la phase opérationnelle» de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC), la question des taxes de Donald Trump sur l’acier et l’aluminium remettaient au goût du jour les débats autour du protectionnisme. Alors, libre-échange ou protectionnisme?

Beaucoup de thèmes en économie présentent un caractère dichotomique. Mais, comme toujours, des nuances s’imposent. L’UA estime que la ZLEC permettra d’augmenter de près de 60 % d’ici à 2022 le commerce intra-africain et de donner un coup de fouet à l’ensemble des économies. Sur le papier pourtant, l’Afrique est une championne de l’intégration régionale avec différents regroupements régionaux censés représenter autant d’espaces de libre circulation des personnes, des biens et des services.

La RDC occupe une place particulière déjà à l’échelle continentale et dans sa sous-région compte tenu de sa position géostratégique, de sa taille, de l’importance de son marché, et des frontières qu’elle partage avec neuf pays. Elle fait partie de la COMESA, de la SADC, de la CEEAC, de la CEPGL, et envisage son entrée dans la Communauté d’Afrique de l’Est. À quelque chose près cependant, ces accords, jusqu’ici, ne se sont pas traduits par un accroissement significatif des échanges entre les pays signataires, et si les faiblesses trouvent leurs origines dans différents facteurs, toutes rappellent que les obstacles pour la ZLEC seront légion.

Du point de vue des infrastructures d’abord. Dans le cas de la RDC comme dans celui de nombreux pays africains, les axes commerciaux hérités du colon reposent sur des routes et des voies de chemin de fer développées jadis, d’une part, pour l’exportation des minerais et autres caoutchouc vers l’ancienne métropole, et, d’autre part, pour l’importation des produits manufacturés.

C’est aujourd’hui encore le modèle sur lequel fonctionne l’économie nationale : les principales voies de communication permettent de sortir les matières premières et d’importer des produits finis, et l’absence d’infrastructures performantes à l’intérieur du pays limite autant le potentiel de développement d’un véritable marché intérieur que celui de se positionner et d’agir en véritable hub régional (et continental). Ensuite, pour paraphraser l’économiste de la CNUCED, Bineswaree Bolaky, interrogée récemment par The Economist, la principale question que devraient se poser les États africains est : « Que pouvons-nous échanger entre nous  ? ».

De ce point de vue, la création de valeur ajoutée apparaît comme l’un des préalables à des échanges équilibrés, mutuellement bénéfiques et créateurs d’emplois de qualité. A priori en effet, l’ouverture des frontières produit ses bienfaits quand elle ne s’inscrit pas dans le contexte d’économies fragilisées, et quand les industries locales sont solides assez pour confronter la concurrence étrangère, sinon pour permettre la création de chaînes de valeur régionales.

Enfin, parce qu’il est nécessaire de définir le produit « africain ». La question revient à se demander comment les industries locales pourront rivaliser en efficacité et en technologies si le libre-échange se traduit, pour les multinationales déjà présentes – sinon actives – en Afrique, par une capacité plus grande encore à pénétrer le marché continental. La question du libre-échange et du protectionnisme se situe indéniablement au centre du développement de la RDC. La libéralisation des échanges promet d’être un moteur pour développer la compétitivité et les performances des entreprises africaines. Mais, pour paraphraser Paul Krugman, récent Prix Nobel, le libreéchange ne doit pas être un espace de « laisser-faire », sans prise en compte de la concurrence imparfaite, des échanges intra-firmes, de la géographie économique, etc. L’avenir nous en dira plus  !

 

Henri Plessers Mboyo
Financialis ACM

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