Italo Calvino, un écrivain italien qui a également grandi loin de l’Italie, écrivait : « pour comprendre combien d’obscurité nous entoure, il faut aiguiser notre regard vers les lumières faibles au loin.
Par Gabriele Salmi
C’était un tisseur. Il a soudé la communauté italienne de la RDC, dont la grande majorité s’investit dans des missions humanitaires, et une partie dans l’industrie, aujourd’hui unie dans des petites et moyennes entreprises. Il a su nous unir, nous réunir, et nous proposer une identité commune, dans laquelle nous pouvions tous nous reconnaître.
Il a parcouru les territoires les plus éloignés de la nation congolaise pour rencontrer les Italiens, connaître leur travail, et découvrir le Congo.
Il a créé un réseau consulaire dans les points les plus importants du pays, a cultivé une décentralisation bienvenue, rendant les compatriotes responsables de leurs concitoyens dans de nombreuses provinces. Il a su aussi bien répondre aux demandes des Italiens au Congo qu’aux Congolais s’intéressant à l’Italie.
Je me souviens de nos échanges exaltés dans son bureau, à propos de l’empire Lunda, de Musumba, du roi M’siri et de Bunkeya, de la Pende, du royaume Kongo, et de la langue Kikongo, des sacrifices de Kimbangu, et de Kimpa Vita, de la beauté et du pouvoir envoûtant des statues Chokwe.
Il était fasciné par le Congo et son histoire, ainsi que par l’histoire des Italiens au Congo, une histoire d’amitié.
Il a fait entrer la chaleur de l’Italie au cœur de la communauté italienne en RDC, et il voulait faire entrer la RDC au cœur de l’Italie.
Au cœur de la diplomatie plus récente, la conception dite « réaliste », fondée sur le pouvoir, voire les intérêts légitimes et la stratégie, a longtemps dominé.
L’ambassadeur Attanasio avait, lui, d’autres priorités, qui pouvaient se résumer par le mot « paix », son but ultime.
La récente pandémie nous a d’ailleurs bien montré que seules la coopération et la loyauté peuvent nous protéger contre les nouveaux défis mondiaux.
Luca Attanasio était un constructeur.
Le bâtisseur d’une paix et d’un dialogue social qu’il ne s’est jamais lassé de tisser, curieux de nouvelles cultures et toujours attentif au très riche capital humain congolais.
Il avait lancé un vaste projet de bourses en Italie, dans tous les domaines, y compris le sport, pour que de jeunes Italiens puissent travailler aux côtés des institutions congolaises, ce même dans « l’état actuel du monde », pour reprendre les mots de l’écrivain congolais Sinzo Aanza.
À Lubumbashi, il a soutenu la Biennale d’art, un événement artistique majeur, qui a mis la ville sur la carte de l’art contemporain mondial. Les organisations comme Laura Vicuna, l’ALBA et le CEF ont également trouvé son assentiment, ainsi que le projet Malaika, ou les initiatives de la Fondation Bismack Biyombo, pour n’en citer que quelques-uns.
Nous devons prendre la mesure de son si bel héritage, afin de le transmettre et de le perpétuer, comme il l’aurait souhaité.
J’adresse toutes mes condoléances à ma chère République démocratique du Congo, qui a perdu un héros, Moustapha Milambo. J’adresse toutes mes condoléances à sa famille, qui a souvent vu ce père et ce mari tenace quitter la maison pour servir le peuple congolais, se précipitant à son secours dans des endroits extrêmement dangereux. Nous ne vous oublierons pas.
Et je salue la mémoire de Vittorio Iacovacci, carabinier. Je veux me souvenir de lui avec les mots du président Ciampi :« Toute l’Italie est reconnaissante aux carabiniers pour leur esprit d’abnégation et leur attachement au devoir, gage de protection pour le citoyen. L’Italie est également reconnaissante pour l’action méritoire menée dans le domaine international, toujours caractérisée par l’humanité et la fermeté dans le respect des civilisations et des traditions ».
Toutes nos pensées vont à sa famille, à ses convictions et ses engagements, aux Carabiniers, à l’Italie.
Toutes nos pensées vont à la République démocratique du Congo.