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Les Grands Entretiens

Retrospective 2021

Louis Watum : Parcours d’un conquérant

Parlez-nous de vos origines ? 

Mon père vient de Mahagi en Ituri, nous sommes nilotiques. Il faisait partie des premiers universitaires de notre pays, à l’université d’Élisabethville, en 1960. Originaire du Kasaï, maman a cependant grandi à Lubumbashi. Elle avait fait ses études secondaires à l’internat de Mbanza Mboma au Bas-Congo, puis était retournée à Lubumbashi (Élisabethville à l’époque) où elle gagnait sa vie comme speakerine à la radio.

Depuis votre arrivée à la tête de la chambre des mines, qu’avez-vous fait pour fédérer les différents acteurs ? 

Au début de l’année 2020, j’ai trouvé une industrie minière très divisée, la plupart des grandes compagnies minières avaient claqué la porte de la Chambre des Mines. La Covid-19 a en plus fortement affecté nos affaires, chaque opérateur minier se concentrait sur les mesures à prendre pour maintenir ses activités sans mettre ses employés en danger. Je ne cesse de répéter aux membres de notre industrie que nous sommes tous dans un même navire. S’il coule, nous coulerons tous et personne ne sera épargné, membres ou non de la Chambre des Mines.

Qui a changé d’avis ? 

Kamoa Copper, MMG et Tenke Fungurume Mining sont revenus, Kipushi Corporation a également rejoint la Chambre. Barrick et Glencore, bien que restés en dehors de la Chambre, manifestent une grande ouverture et collaborent avec la Chambre des Mines notamment sur toutes les questions sensibles qui affectent l’industrie minière.

Célestin Mukeba

La grande annonce économique de 2020 a été le rachat de la vénérable BCDC par le groupe Equity. Une année plus tard, M&B a rencontré Célestin MUKEBA MUNTUABU, Directeur général d’EquityBCDC.

Quel est votre parcours ? 

Je suis marié et père de deux enfants. Ma femme est modéliste et styliste, elle a une société industrielle dans la mode. Elle fait partie des rares entre – preneurs dans l’industrie de la mode en RDC. Je suis économiste de formation, j’ai un diplôme en gestion des entre – prises de l’Université Protestante au Congo ainsi qu’un diplôme de l’Académie Procredit à Fürth en Allemagne ; actuellement, je fais mon master à Havard Business School aux USA. Passionné par le fonctionnement du corps humain, j’aurais aimé faire la médecine. Je suis resté un grand lecteur d’articles sur la médecine. Bien avant cela mon rêve d’enfance était l’aviation.

J’ai débuté ma carrière professionnelle dans un cabinet d’audit comptable et de fiscalité qui faisait également la formation des cadres d’entreprise en matière de contrôle et d’audit interne. J’ai une bonne connaissance dans tous ces domaines. Avoir l’œil d’un auditeur externe m’a tellement captivé que j’ai complété cette expérience en intégrant PricewaterhouseCoopers. Ma carrière dans le secteur bancaire a débuté en 2006 où j’ai été recruté pour structurer le département finance de ProCredit Bank. J’étais en charge de toute la trésorerie, la gestion des équipes ainsi que le rapport financier.

Nefertiti Tshibanda 

Déléguée générale à la francophonie

La RDC compte-t-elle appliquer un plan directeur pour le déploiement du numérique ? 

Une stratégie du numérique francophone a été adoptée à l’horizon 2020. Nous voulons rénover ce domaine en perpétuel mouvement. Une nouvelle stratégie va encore être présentée, avec un plan qui se veut beaucoup plus pragmatique et surtout plus utile pour le pays, qui doit rattraper son retard à ce niveau-là. Nous nourrissons de grandes ambitions pour la RDC. Une fois opérationnel, ce projet pourrait pourvoir plus ou moins 1500 à 2500 emplois dans le numérique, sans compter l’impact sur la façon de créer des entreprises.

Le numérique peut-il compenser le manque d’éducation et d’information dans certains endroits ? 

Au sein de l’O.U.F, nous disposons d’un centre d’animation culturelle, qui existe depuis longtemps. En RDC, nous en recensons dix, et nous espérons en créer encore quatre supplémentaires cette année. Ces centres sensibilisent la population à la lecture publique. Nous leur faisons parvenir des livres que les jeunes ont la possibilité de venir emprunter, ainsi que des ordinateurs.

Nous voulons généraliser cet élan en introduisant des tablettes dans des parties reculées du pays. On apprend aux enfants comment les utiliser pour les recherches, comment obtenir des livres en ligne, comment consulter un dictionnaire virtuel, ou comment regarder des films. Nous avons regroupé l’éducation, la lecture publique et le numérique. Le numérique équivaut en effet à une autoroute de communication.

Mony Samba Kayabala

« Mettre l’Homme au centre de son action au Tanganyika »

Vice-gouverneur de Zoé Kabila lors de son passage à la tête du Tanganyika entre 2019 et 2021, il l’a remplacé après sa destitution en mai 2021.

Pouvez-vous résumer votre profil ?

Je suis natif de la province du Tanganyika, précisément du territoire de Moba. Je suis fils de feu professeur SAMBA KAPUTO et de Brigitte NZIGIRE RUTEGA. Père de deux enfants, un garçon de 10 ans et une fille de 8 ans. Pour mes études, jusqu’au secondaire, j’ai évolué à Kinshasa. Mes études secondaires ont été sectionnées en plusieurs fois parce que mon père étant vice-gouverneur, j’ai fait le tour de presque toutes les provinces du Zaïre, sauf le grand Katanga et le Kasaï. J’ai ensuite voyagé en Europe où j’ai été formé en architecture. Enfin, j’ai obtenu mon diplôme en gestion des entreprises à l’Institut Européen de Bruxelles. À la fin de mes études, je suis rentré directement en Afrique parce que cela a toujours été ma motivation.

Votre programme en 5 grandes priorités ?

1) la sécurité, 2) l’électricité, 3) l’eau, 4) la santé pour tous, 5) l’industrialisation de nos ressources : l’agriculture, la pêche, l’élevage. Pour le reste du programme, nous avons la voirie et le port de Kalémie, le port de Moba, le pont de Nyemba, certaines routes essentielles à la province vont également être réhabilités dont les axes Kalemie-Lubumbashi, en passant par Pweto, Kalemie-Manono. Je souhaite que notre population soit autonome en permettant l’industrialisation de toutes les ressources de la province du Tanganyika.

Pascal Kasongo Mwema 

M&B a rencontré le nouveau DG (AI) qui a pris les commandes de la compagnie, en juillet dernier. Conversation en plein vol.

Quel est votre parcours ? 

Je suis pilote depuis 32 ans, j’ai eu un parcours international. J’ai commencé dans ce que l’on appelle le VIP, pilote à la Gécamines. Puis j’ai migré vers le privé pour voler pour des compagnies comme Shabair, Zaïre express, Zaïre Airline. J’ai ensuite poursuivi ma carrière en Afrique du Sud, avant de me retrouver en Belgique où j’ai été recruté comme commandant de bord pour la compagnie Sabena jusqu’à sa faillite en 2001. Cette même année, j’ai été redirigé vers une structure nouvelle qui s’appelle aujourd’hui Brussels Airlines.

Enfin, j’ai volé au Moyen-Orient, précisément au Royaume de Bahreïn où j’ai été pilote du roi de Bahreïn de 2005 à 2015. Vous avez donc fait du Very VIP ! Cela se termine en quelle année ? En 2015. Cela va me donner l’occasion de découvrir l’Asie, l’Europe de l’Est. Un parcours très intéressant. En 2015, j’étais au Bahreïn lorsque le projet de la création de Congo Airways se met en place.

Quelle est votre feuille de route pour la compagnie ? 

La mission de Congo Airways est double. Nous avons un grand pays que nous devons servir, avec un déficit d’infrastructures. Nous devons le désenclaver. Notre vocation est de contribuer à l’essor économique de la nation, car les mouvements des biens et des personnes sont vecteurs de développement.

Gigi Kisimba 

Secrétaire Générale de Brasimba – Groupe Castel

Comment avez-vous commencé chez Brasimba ? 

Après mes études secondaires à l’institut MADINI, je me suis rendue en Belgique, d’où je suis revenue avec le diplôme de fiscaliste et le titre d’expert-comptable. Brasimba m’a recrutée en 1991 en tant que comptable. Depuis 2012, j’y occupe le poste de secrétaire général. Aujourd’hui nous faisons partie du groupe CASTEL avec deux sites de production, à Lubumbashi et Beni, ainsi que sept centres de distribution.

Quelles actions fortes Brasimba a-t-elle mises en œuvre ? 

La société a développé un circuit de vente en dehors de grandes villes, cela permet à la population congolaise d’accéder plus facilement à nos produits. Malgré les infrastructures déficientes, on n’a pas pu se rendre au fin fond de la province du Katanga par exemple. Cela dit, nous nous sommes tout de même rendus à Lwisha, Kansenga, Kilwa, Kashobwe et Mpweto; nous avons vraiment été dans les périphéries pour rendre nos produits accessibles.

Comment peut-on changer les mentalités pour lutter contre le sexisme ? 

Le changement des mentalités passe par des initiatives pour promouvoir l’égalité entre les sexes. Il peut s’agir d’interviews, comme celle que vous m’accordez, ou des conférences liées au développement de la femme, ainsi que toutes les initiatives qui peuvent renforcer sa promotion. La Brasimba est même un levier du développement de la femme. Vous retrouvez des femmes dans toutes les directions, dans le domaine administratif, dans le domaine technique et dans le domaine commercial.

Jean-Jacques Lumumba 

Vérités de l’ancêtre des révélations Congo Hold Up

En 2016, Jean-Jacques Lumumba, cadre financier à la BGFI, est le premier lanceur d’alerte Congolais à dénoncer des détournements de fonds publics. Le petit-neveu de Patrice Lumumba revient pour Mining & Business sur l’enquête «Congo Hold-up».

Les révélations de «Congo Hold-up» sont dans la continuité des malversations que vous dénonciez en 2016 au sein de la BGFI ? 

Oui, sauf que cette fois-ci, les révélations vont bien plus loin que la société Egal, la CENI ou la Gécamines. L’enquête ne s’arrête pas au Congo et nous amène en Asie, en Belgique, en Suisse et aux États-Unis. On a retrouvé beaucoup de biens achetés par les proches de la famille Kabila aux quatre coins du monde. Cette fuite de données permet de comprendre comment les finances publiques de l’époque ont été siphonnées par un clan. C’est le cas d’une seule banque pendant une courte période, entre 2013 et 2018. Cela permet de révéler toute l’étendue de la mégestion du pays. Et si on va plus loin, on découvrira beaucoup d’autres cadavres dans les placards.

Ces révélations montrent-elles les faiblesses du système bancaire congolais, avec notamment des retraits de plusieurs millions de dollars en liquide ? 

La corruption est un mal profond au Congo, qui est principalement localisé au sein du système bancaire. Ce qui met à mal l’accès du pays à beaucoup de financements internationaux. La corruption des banques ne nous ouvre pas les voies de la confiance et de la crédibilité auprès de nos partenaires extérieurs…

Jean-Dominique Takis

Les lignes bougent dans le monde du Cobalt

Jean-Dominique Takis Directeur Général de Entreprise Générale du Cobalt. Au cours d’un long entretien consacré à notre publication, il a dévoilé la stratégie de EGC.

À propos des objectifs de EGC, l’entreprise publique produira environ 8 000 tonnes de cobalt sous forme d’hydroxyde en 2021 ? 

Oui, les 8 000 tonnes sont l’objectif pour cette année parce que nous allons mettre en place un système global de nature à respecter les meilleures normes d’approvisionnement dans le respect des travailleurs et de l’environnement. Une fois que nous aurons fait cela, étant donné que l’année est déjà bien entamée, notre objectif sera de passer ensuite l’année prochaine à 15000 tonnes, car nous aurons plusieurs sites en exploitation.

Notre modèle économique est fondé sur une approche de profit-sharing entre tous les acteurs : les mineurs évidemment qui extraient le minerai, l’État qui a mis en place le système et à qui l’exploitation des ressources doit profiter et EGC qui exécute cette politique publique pour le compte des Autorités.

Vu d’où l’on vient en RDC, certains parlent d’objectifs trop ambitieux. Que répondez-vous à cela ? 

Trop ambitieux, je ne pense pas, parce que le potentiel de l’artisanat existe. La contrainte n’est pas dans l’ambition du volume, elle est plutôt dans la mise en place du monopole, parce que vous commencez par les sites. Il y a ceux qui travaillent déjà tout en n’étant malheureusement pas dans les normes, mais le font pour gagner leur pain. Nous avons donc 6 mois pour que tout le monde s’adapte à la nouvelle donne, artisanaux, coopératives, usines de traitement…

Emmanuel Véron 

« Il faut décrire la Chine et la faire comprendre aux décideurs africains »

Docteur en géographie et spécialiste de la Chine, Emmanuel Véron suit la Chine depuis une quinzaine d’années. Il a été enseignant à l’Université Paris I, à l’INALCO, puis à l’école Navale en France.

Le gouvernement congolais veut renégocier certains contrats miniers passés avec la Chine. Qu’en pensez-vous ? 

Je crois que ce qui est très important sur la relation forte entre Pékin et la RDC est de rappeler la capacité d’influence de la Chine dans cet immense pays sur la question des ressources naturelles. Cette question-là est au cœur même de la politique étrangère de la Chine pour les pays émergents et en développement. (…) Les chinois cherchaient à rendre encore plus vulnérables des pays en développement comme la RDC par un endettement très lourd, par des prêts très très importants qui jamais ne pourront être remboursés dans le cadre de négociation ou d’accords-cadres, notamment sur l’extraction minière, l’exploitation de bois ou des terres agricoles.

La Chine serait donc «irrésistible» ? 

Non, le plafond de verre pour Pékin dans sa politique africaine par rapport à ces grands contrats, ce sont les politiques de contre influence menées par Washington et d’autres vis-à-vis de Pékin dans la rivalité stratégique et aussi une sensibilisation plus concrète des acteurs africains dans la relation avec Pékin. Et c’est surement là que se jouera l’avenir: quelles sont les capacités de réveil et de prise en compte de la politique chinoise par les élites africaines elles-mêmes ?

Honorable Jacqueline Bisimwa Murangaza 

Présidente de l’ASSOFE, propriétaire de la Soociété Stephy-Mondo, elle assume et occupe plusieurs postes de responsabilités en RDC et en Afrique. Vice-Présidente Afrique au Bureau de l’Association Mondiale des Femmes Chefs d’Entreprises mondiales « FCEM », une organisation membre observateur des Nations unies au niveau international, elle met en avant les femmes pour leur contribution dans la dynamique sociale sur le continent.

Selon vous, quel est l’apport d’une femme dans l’entreprise ? 

Les femmes et les hommes avons les mêmes capacités, mais aussi nos différences. Une femme qui est consciente du rôle qu’elle joue dans son entreprise commence par prôner les valeurs positives, une éthique.

Nous avons constaté à travers les enquêtes que beaucoup de femmes qui ont leurs propres entreprises sont confrontées à des difficultés, des préjugés liés à nos coutumes, à l’environnement culturel, socio-économique et politique que vous connaissez et qui souvent ternissent son image, qui laisse entendre que les femmes ne construisent pas, alors que c’est faux et archi faux. Elles sont obligées de faire trois fois plus pour être acceptées et s’imposer par rapport à leurs partenaires de sexe masculin.

Évidemment, la formation est également importante. Pas seulement la formation scolaire ou universitaire parce qu’il y a des femmes qui gèrent très bien leurs entreprises sans être allées sur le banc de l’école. Je les appelle des « self-made women ».

 

 

 

 

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