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INTERVIEW DE S.E MONSIEUR L’AMBASSADEUR DE L’UE, MONSIEUR NICOLAS BERLANGA MARTINEZ

Excellence M. l’Ambassadeur, bonjour. Pourriez-vous vous présenter en quelques mots, quelle est votre carrière ?

Je m’appelle Nicolas Berlanga Martinez. Je suis diplomate européen depuis 2002. En 2009, l’Union européenne a approuvé ce qu’on appelle le traité de Lisbonne, qui a donné forme à la création d’un service diplomatique européen qui s’appelle le service européen pour l’action extérieure. C’est un service hybride qui est formé par des diplomates européens et des diplomates nationaux, des diplomates des États membres. On a pensé qu’en créant cet organisme où il y a cette combinaison de diplomaties bilatérales qui travaillent depuis longtemps avec certains partenaires et ces diplomaties modernes européennes, on allait créer des synergies pour pouvoir travailler davantage ensemble.

Et dans ce sens, moi, je me suis incorporé à ce service européen pour l’action extérieure.  J’étais ambassadeur de l’Union européenne au Togo en 2013-2017, en Somalie depuis 2019-2021 et en République démocratique du Congo depuis 2023.

Et comme vous savez, dans la diplomatie, il y a tout un processus pour la nomination d’un ambassadeur qui requiert l’agrément de la part de ses autorités. Cet agrément a été donné autour de mi-novembre. Donc je suis arrivé deux semaines après.

Et comme il y a eu les élections, le 11 janvier 2024, j’ai présenté mes lettres de créance au chef de la République.

Pour nos lecteurs, pourriez-vous expliquer le poids et le rôle de l’Union européenne, de la coopération de l’Union européenne en RDC ?

L’UE est partenaire du Congo depuis longtemps, je dirai même du moment des indépendances. C’est vrai qu’à l’époque, on ressentait plus la Commission européenne, l’Exécutif des institutions européenne avec une approche plus tôt développement.  Il y a quelques mois, on a fait une étude qui nous a montré qu’autour de 17% de Congolais se sentaient bénéficiaires directs ou indirects des actions de l’Union européenne. Nous, on a fait aussi, pour confirmer aussi nos actions, il y a actuellement, il y a 12 millions de Congolais qui ont accès à la santé et à l’éducation grâce au soutien de l’Union européenne. Il y a 45 territoires sur les 124 qui profitent de l’appui de l’Union européenne.

Il y a 5 espaces naturels, les parcs de Virunga, Salonga. Donc on a essayé de chiffrer et montrer qu’effectivement, cette idée de partenariat qui est très bien ancrée, nous pensons, dans la société congolaise, doit être renouvelée continuellement.

Je pense que le changement, que vous me demandiez avant sur la diplomatie européenne, c’est changement à partir de 2009, j’ai oublié de vous dire que les ambassadeurs européens, 50% sont des diplomates européens, 50% sont des diplomates des États membres. Et c’est pour cela que, par exemple, mes trois prédécesseurs ont été des diplomates des États membres. Cette fois-ci, après un processus qui est très concurrentiel, ils ont décidé de me nommer, moi, un diplomate européen de nationalité espagnole comme ambassadeur de l’Union européenne au Congo.

Effectivement, je pense que depuis 2009, grâce à ces changements, on s’assure plus comme partenaire diplomatique, c’est-à-dire en couvrant beaucoup de secteurs du dialogue politique, d’appui macroéconomique, d’appui humanitaire.

Et malheureusement, on a la tragédie de ce qui se passe à l’Est jusqu’à arriver au développement. L’appui sécuritaire, la RDC, a été la première mission de défense, de l’UE en 2003, 2004 aussi, pour assurer la sécurité à l’Est du pays. 

Il a été un grand succès. Et ce succès nous a permis, effectivement, de développer ce volet de sécurité et de défense à l’Union européenne, qui est maintenant, 20 ans après, très bien consolidé. Et grâce à cela, maintenant, on est présent dans plusieurs scénarios théâtres de conflits.

Donc, c’est une question de médiation. Et dans cette évolution, il faut dire qu’on s’est rendu compte qu’aussi les pays africains nous demandaient une autre manière de les regarder.

Ils demandaient un partenariat entre égaux, un dialogue plus basé sur leurs propres ambitions et leurs propres projets. Et dans ce sens, on a répondu présent. Et on est en train d’évoluer vers une approche plutôt investissement. 

Notre présence en RDC doit être dynamique et s’aligner à l’évolution du propre pays. Et ce pays qui n’est pas le même démographiquement. Vous savez, depuis 1980, le Congo a multiplié par 4 ou 5 sa population. Les institutions ne sont pas les mêmes. Elles sont beaucoup plus enracinées. Et il y a d’autres partenaires aussi qui sont présents dans le pays que peut-être il y a 20 ans ou 30 ans, ils n’étaient pas. Donc, dans ce sens, je pense que le fait d’évaluer l’Union européenne dans ses actions, ses activités, ses engagements vis-à-vis de la RDC, ne fait que répondre à la propre évolution du pays.

D’autant plus qu’on est en pleine transition verte, transition énergétique dans le monde entier. Le Congo n’a pas seulement un sous-sol riche, est aussi le premier poumon au monde maintenant en termes de lutte contre les changements climatiques. Le bassin du Congo est le plus important maintenant.

Donc, dans ce sens, combiner des actions en faveur de cette transition verte énergétique et aussi en préservant la forte capacité du Congo en termes de lutte contre les changements climatiques nous paraissait essentiel.

Il y avait un autre aspect sur lequel on a beaucoup évolué, à mon avis positivement. C’est le fait de travailler ensemble. Nous l’appelons équipe Europe.

C’est-à-dire de nous rendre compte que, vu les enjeux internationaux, les enjeux du peuple congolais, on serait plus efficace en travaillant ensemble, l’Union européenne et ses États membres.

Et notre présence dans cette Mining week est un très bon exemple. On a travaillé ensemble, on a préparé énormément d’activités ensemble. Tous les stands et nos États membres ont une connotation européenne.

En fait, ce n’est qu’un premier pas, ou un deuxième pas, parce qu’on était déjà présents l’année dernière, pour continuer dans cette direction.

Donc, voilà un peu la description de notre présence. Je voudrais préciser aussi un autre aspect. C’est que si vous regardez la forteresse de l’Union européenne, pas seulement en termes financiers, mais en termes de partage culturellement d’une vision civilisatrice avec la population du Congo, la puissance technologique de nos entreprises de l’Union européenne, je pense qu’il n’y a pas d’autre.

La capacité d’échanger dans une langue que l’on partage, je pense que ça nous donne une présence très positive, très constructive, sur laquelle il faut évidemment continuer à construire de la confiance.

Notre idée fondamentale maintenant, c’est de développer est une feuille de route d’un protocole d’entente, donc d’une déclaration d’intention qu’on a signée avec la RDC en octobre 2023, pour avoir une liste de projets qui montrent quel est le modèle européen d’investissement, notamment dans les secteurs miniers, mais pas seulement dans les secteurs miniers. On parle des infrastructures, on parle d’énergie, on parle des agrobusiness. Donc, c’était un partenariat en faveur de la diversification économique. 

Pouvez-vous nous donner une idée du budget annuel, à propos de coopération avec l’Europe ?

Je peux vous parler au nom de l’Union européenne. Je ne connais pas les chiffres au niveau des États membres. Vous savez qu’il y a quelques États membres qui sont très présents au Congo. Mais pour ce qui concerne l’Union européenne, seulement en termes de dons, donc des transferts sans conditionnalité, nous sommes autour de 200 millions d’euros par an, y compris l’aide humanitaire.

Mais justement, nous avons développé un nouvel outil qui s’appelle Global Gateway, qui est en fait, une manière de concentrer nos actions dans la collectivité, dans les infrastructures, dans la santé, dans l’éducation, et mobiliser aussi des fonds privés.

L’intention de ce Global Gateway, est de mobiliser, de 2021 à 2027, 150 milliards d’euros pour l’Afrique. 

Quelle serait la partie pour la RDC ?

Cela dépend de dynamisme des autorités, à savoir présenter des projets, identifier ensemble des initiatives. Dans la délégation européenne qui est à la Mining Week, il y a les représentants de la Banque européenne d’investissement, par exemple. Et on travaille beaucoup avec d’autres banques d’investissement européennes, comme ProParcours, comme la KFW Allemands et d’autres. Et donc, dans ce sens, la vocation, c’est de mobiliser des fonds publics en termes de dons ou de garanties. Parce que vous savez que beaucoup d’investisseurs demandent des garanties avant de faire des investissements privés. Donc, en combinant ces partenariats publics privés plus les dons, l’ambition, c’est de mobiliser une quantité très significative pour le Congo. 

M&B

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