Si au XXe siècle, la « guerre froide » opposait les États-Unis et l’URSS et leurs alliés respectifs, dont le Zaïre coté USA, une nouvelle guerre froide fait rage entre le pays de l’oncle Sam et la Chine. Encore une fois, le Congo est l’un des champs de bataille, autour de ses minerais « stratégiques » ou « critiques », cobalt, cuivre, or, coltan et lithium, considérés comme essentiels pour réussir la transition énergétique et la décarbonation de l’économie mondiale.
Il y a quelques années, en effet, les USA se sont désintéressés de l’Afrique sur le plan économique. Pendant ce temps, la Chine en a profité pour conquérir presque sans concurrence – grâce à ses immenses capacités financières, techniques et humaines –, la majorité des actifs miniers africains, particulièrement les mines de cuivre et de cobalt de la République Démocratique du Congo. La Chine a bien sûr aussi profité d’un désir, bien compréhensible, des États africains de se tourner vers d’autres partenaires commerciaux que les Occidentaux, en leur proposant de séduisants deals « mines contre infrastructures ». Notons que la Chine aura rarement respecté ce deal, au final, comme l’a montré l’affaire de la renégociation du contrat Sicomines.
En RDC, en 2024, la grande majorité des compagnies minières sont détenues par des capitaux chinois, privés et/ou étatiques, essentiellement dans le cuivre et le cobalt. Les producteurs et leurs sous-traitants, mais aussi les acheteurs de ces minerais congolais, sont presque intégralement des structures chinoises. L’illustration la plus connue du passage de relais entre les USA et la Chine fut le rachat en 2016 par la compagnie étatique chinoise CMOC des parts du groupe américain Freeport McMoran dans l’actif congolais TFM.
Depuis lors, la domination chinoise dans le secteur minier congolais est patente, portée et défendue, si nécessaire, par l’ambassade de Chine. Les sociétés minières congolaises à capitaux chinois ont même créé leur propre association, en parallèle de la Chambre des Mines de la FEC, estimant que cette dernière ne défend plus suffisamment ses membres face aux autorités du pays.
Face à cette toute-puissance et après avoir laissé la Chine prendre beaucoup d’avance, les États-Unis ont, depuis quelques années, décidé de revenir dans le jeu en RDC, et ailleurs en Afrique. A priori, aucune compagnie minière américaine n’a de projet d’investissement en RDC, à cause des faiblesses persistantes en matière d’état de droit et de corruption. Seuls quelques fonds américains s’intéressent à des actifs miniers congolais. En revanche, l’industrie américaine (et pas seulement les GAFAM ou Tesla) recherche de plus en plus à s’approvisionner en minerais africains sans passer par l’étape des produits semi-finis chinois, dont elle est devenue trop dépendante. L’Union européenne suit la même tendance.
De son côté, le Congo, notamment pour ne pas froisser l’allié stratégique et monétaire américain, cherche aussi d’autres partenaires que les entreprises chinoises pour venir investir. En effet, le secteur minier qui n’a plus connu de nouveaux grands investisseurs depuis CMOC.
USA et Chine se sont lancés dans des politiques de sanctions ou restrictions mutuelles (sur les semi-conducteurs, les terres rares, etc.). Le président américain a déjà prévenu qu’il allait lourdement augmenter les droits de douane sur les produits chinois, notamment sur les véhicules électriques.
Autre exemple récent de cette guerre géostratégique : le développement, soutenu par les États-Unis et l’UE, du « Corridor de Lobito », permettant l’exportation des minerais de la Zambie et du sud-est de la RDC vers l’Océan Atlantique, donc plus proche des USA et de l’Europe.
Il incombe maintenant à la RDC de saisir l’opportunité de cette nouvelle guerre géostratégique pour prendre des positions favorables à son essor socio-économique.