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Bart Coessens Consul général de Belgique à Lubumbashi

Après plus de deux ans sans représentation officielle à Lubumbashi, la Belgique a rouvert son consulat. La rédaction de Mining and Business a

Après plus de deux ans sans représentation officielle à Lubumbashi, la Belgique a rouvert son consulat. La rédaction de Mining and Business a rencontré le nouveau Consul général de Belgique pour le Grand Katanga. Il se confie sur le démarrage de sa mission, sur les relations entre son pays et la République Démocratique du Congo, après la brouille, et ses espoirs pour l’avenir. Interview portrait.

M&B : Bonjour Monsieur le Consul général. Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?  

BC : Je suis Bart Coessens, le nouveau consul général de Belgique à Lubumbashi. Je suis arrivé à Lubumbashi fin novembre 2019. Le consulat avait été fermé le 6 février 2018, suite à la détérioration des relations entre la Belgique et le Congo. Après les élections et avec l’arrivée au pouvoir du président Félix Tshisekedi, il a été décidé de rouvrir notre consulat à Lubumbashi et la maison Schengen à Kinshasa. L’ouverture officielle du consulat a eu lieu en présence de notre Première ministre, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Coopération, le 7 février 2020. Le Gouverneur  Haut-Katanga, le Président de l’Assemblée provinciale du Haut-Katanga et le maire de Lubumbashi étaient aussi présents 

Et quel était votre poste précédent et quelles sont les grandes différences avec votre nouvelle mission à Lubumbashi ?

Je viens de Sofia en Bulgarie où j’étais le chef adjoint de mission, et le numéro 2 de notre ambassade. Je m’occupais de la politique bilatérale et européenne. Pendant mon séjour à Sofia, la Bulgarie avait la présidence du Conseil européen, ce qui nécessitait beaucoup d’organisation. En effet, pendant cette période de la présidence tous les grands sommets européens se tenaient à Sofia. Il y avait deux grands dossiers, la corruption en Bulgarie qui était encore assez présente, et le problème de l’exode des Bulgares qui quittaient leur pays pour aller travailler en Europe de l’Ouest, aux États-Unis ou au Canada. Là, mon travail était plus politique, moins généraliste. 

Et à Lubumbashi ?

Ici, au Consulat général, je m’occupe aussi bien du consulaire, de la coopération, les échanges économiques que des relations bilatérales ou la gestion du bâtiment. Il est prévu qu’un numéro 2 arrive début septembre. Sa venue a été reportée à cause du coronavirus. Notre consulat, présent à Lubumbashi depuis 1960, a été plusieurs fois fermé et rouvert. Ce consulat s’occupe des visas et des Belges, beaucoup moins de la politique, parce que pour la politique bilatérale, c’est notre Ambassade à Kinshasa qui est en charge. Donc, c’est d’abord la communauté belge, qui est d’environ 800 personnes inscrites. Si l’on comptait les non-inscrits, on arriverait à environ 1 000 personnes. Le deuxième aspect du travail de notre consulat est la délivrance des visas.

Vous connaissiez déjà le Congo ?

Oui  et non ! Je n’y avais jamais mis les pieds, mais mon père est arrivé à Lubumbashi en 1947 quand il avait 21 ans. Il a travaillé pour la BCDC et pour la Gécamines comme comptable et il est rentré en Belgique avant ma naissance. Mais je me rappelle très bien qu’étant jeune il me parlait souvent, avec beaucoup de nostalgie de son séjour ici de presque 10 ans. Il a aussi travaillé à Likasi et à Kolwezi dont il avait gardé de beaux souvenirs. Quand je vais à Likasi ou Kolwezi, je me rappelle que mon père y était avant ma naissance. Quand je vois ses photos devant la poste, la gare de Lubumbashi ou devant sa maison, c’est assez émouvant. Ce qui est intéressant, c’est qu’à la Gécamines, ils ont gardé les archives de leur personnel et j’ai retrouvé la fiche de mon père.

Quelle est votre feuille de route ?

La réouverture est intervenue le 7 février dernier et Madame la Ministre nous a donné les grands axes de la reprise des relations entre la Belgique et le Congo. Elle a clairement dit : « On tourne la page. Avec le président Tshisekedi qui connait très bien la Belgique, il y a la possibilité de reprendre les relations sur la base de vrais partenariats entre deux pays souverains ». C’est-à-dire qu’on relance la coopération bilatérale avec le Congo qui a toujours été notre premier pays en termes de coopération. On reprend aussi la coopération militaire et la coopération policière et judiciaire, la formation des juges et la formation des policiers. Le deuxième élément, c’était la réouverture de la maison Schengen à Kinshasa pour la délivrance des visas Schengen. 

Et plus précisément sur Lubumbashi ?

Il y a un grand projet EDUKAT de la coopération belge : éducation et formation à l’institut Kilima où il y a un centre de formation professionnelle pour le secteur minier, le transport et la construction, avec des formations excellentes pour les jeunes. Nous avons procédé à l’ouverture officielle et la remise des clés du centre en présence du vice-gouverneur et du ministre provincial de l’éducation. Le deuxième grand projet est l’électrification de la cité Karavia pour donner accès à l’électricité à des prix raisonnables. Pour ce projet, l’intervention belge sera augmentée.

Quel est le montant de la coopération belge ?

Pour Lubumbashi, le budget EDUKAT s’élève à 14,7 millions d’euros et 14 millions d’euros pour le projet PRELUB (l’électrification de la cité Karavia). Soit un total de presque 30 millions d’euros. Nous sommes fiers de ces projets très concrets, avec des résultats très directs en faveur de la population.

Il y a la feuille de route officielle, mais il y a aussi ce que vous personnellement avez envie de faire.

Oui, vous avez raison, il y a deux aspects qui me passionnent : la diplomatie académique et les échanges universitaires et d’autre part, les échanges culturels. Tous nos projets ont été bouleversés par la pandémie. Je voudrais relancer la participation belge à la Biennale de Lubumbashi l’année prochaine, un projet avec une école d’art à Lubumbashi, et une plus forte coopération entre le musée de Tervuren et celui de Lubumbashi. Et finalement, je voudrais m’investir dans la diplomatie provinciale, c’est-à-dire les jumelages entre villes congolaises et belges ; des projets de coopérations et d’échanges entre entités provinciales. Il y a par exemple une coopération entre la ville de Liège et l’Office de l’état civil à Lubumbashi. Tous ces échanges, académiques, culturels, provinciaux à différents niveaux nous permettent de mieux nous connaitre mutuellement.

Pourriez-vous nous parler de l’état des échanges économiques entre la Belgique et le Congo ? 

Nous avons de grands groupes belges au Congo : le groupe Forrest, Bruxelles Airlines, Damso, qui est dans l’agriculture et l’alimentation, Texaf qui est dans l’immobilier, il y a aussi ConnexAfrica, pour n’en citer que quelques-uns. Il y a d’autres acteurs économiques moins grands qui font partie du Bel 20. Je citerai enfin notre Cercle belge et l’école belge.

À propos d’école belge, quelles sont les actions de la Belgique pour l’éducation ?

Vu le nombre des expatriés belges qui a diminué, on a moins d’enfants belges. Néanmoins, l’école belge reste une très bonne école avec de belles infrastructures qui attire beaucoup d’enfants congolais. Leurs parents visent les diplômes reconnus en Belgique. Au consulat nous délivrons les visas long séjour étudiant aux enfants congolais qui ont terminé et obtenu leur diplôme à l’école belge reconnu en Belgique et leur permet de poursuivre des études supérieures en Belgique. Cela me fait toujours un grand plaisir de voir des jeunes de 18 ans, partir faire leurs études en Belgique pour des formations économiques ou hautes études en gestion et management. D’autres partent faire des études de médecine, des études d’ingénieurs civils et espèrent retourner au Congo pour valoriser leurs diplômes. Ce sont ces échanges académiques qui donnent des possibilités dans les deux sens : des étudiants congolais font leurs études en Belgique et de jeunes Belges viennent aussi au Congo. Il y a déjà beaucoup de liens et d’échanges entre l’université de Lubumbashi et l’université de Liège et/ou de Bruxelles. Ce sont des choses que je voudrais bien relancer et réactiver pendant mon séjour ici, parce que comme vous le savez, la Belgique c’est le centre de l’Europe ; on a les institutions européennes et l’OTAN où ils peuvent établir des contacts. Selon moi, il faut créer et renforcer les ponts entre le monde des affaires, l’académique et le secteur culturel.

Justement, on peut parler des visas ? 

Avec cette crise de la pandémie, on avait fermé notre section visas. Nous venons de rouvrir surtout pour ce qui est long séjour, afin de permettre aux étudiants d’entamer leurs études. Mais la délivrance de visa de court séjour est encore très limitée pour l’instant. Pour ce qui est des chiffres, on délivrait environ 1 600 visas par an, long et court séjours confondus. Ce qu’il faut savoir c’est qu’il y a toujours un risque d’usage des faux documents. La Belgique, dans le cadre européen, a mis en place à Kinshasa et à Lubumbashi un système de contrôle de la vérification détaillée de tous les documents. Ceci pour éviter l’usage de faux documents ou de fausses déclarations.

Il y a toujours une quatorzaine pour des personnes qui voyagent en Belgique ?

Pour l’instant, nous sommes toujours au stade de délivrer des visas uniquement pour des voyages essentiels et les visas étudiants. C’est-à-dire qu’on ne délivre toujours pas de visas touristiques. En ce moment, en Belgique, il y a une période de deux semaines de quarantaine obligatoire et le passager doit présenter un test covid-19 pour la compagnie aérienne et s’enregistrer en ligne 48 heures avant d’arriver en Belgique. 

Propos recueillis par Oliver Loury

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