La nouvelle a consterné le Tout Kinshasa. L’homme d’affaires et collectionneur d’art danois, d’origine congolaise, Sindika Dokolo est décédé subitement jeudi 29 octobre à Dubaï.
Il est né en 1972, fils d’Augustin Dokolo Sanu et d’Hanne Kruse, une danoise épousée en 1968. Son père, premier banquier privé du Zaïre, avait édifié l’un des plus vastes empires économiques du Zaïre de Mobutu, avant de se faire déposséder de ses biens. Le jeune Sindika avait ainsi grandi avec l’expérience de la chute.
En 2002, il se marie avec la très belle Isabel dos Santos, fille de José Eduardo dos Santos, ancien président de l’Angola à qui il vouera une grande admiration. Ils auront quatre enfants. Le couple multiplie les opportunités de business dans la téléphonie, les hydrocarbures, le ciment, la distribution et les diamants. Isabel, devient ainsi « la femme la plus riche d’Afrique ». Toujours invités aux grands rendez-vous du monde des affaires, ils alimenteront la presse people. On les verra à Cannes en France, présenter l’acquisition d’un énorme diamant pour le compte du joaillier suisse De Grisogono dont Sindika Dokolo était devenu l’actionnaire principal.
Au début de l’année 2020, les « Luanda leaks » ont exposé les dessous de l’empire financier du couple. Mr Dikolo et son épouse contrôlaient intégralement ou en partie pas moins de 450 sociétés, le plus souvent offshore. Trois procédures de détournements massifs de fonds publics sont par ailleurs toujours en cours en Angola, aux Pays-Bas et au Portugal.
Dandy cultivé et homme d’affaires expérimenté, Sindika Dokolo est devenu subitement un observateur attentif de la scène politique régionale et congolaise. Ce fils du Congo a fondé, en 2017, un mouvement citoyen, « les Congolais debout ». Ces vidéos fort bien produites inondent la toile pour dénoncer le régime de Joseph Kabila. Il appuie financièrement d’autres organisations et personnalités.
Sa réputation, il l’a faite sur la scène des arts et de la culture européenne, à Porto et à Bruxelles où Sindika Dokolo est reconnu comme un collectionneur d’art africain majeur. Il achète des œuvres pour sa collection privée, devenue l’une des plus importantes au monde. Il traque sur le marché, de manière quelquefois retentissante, des objets et des œuvres pillées durant la colonisation, afin de les acquérir et les restituer à leurs pays d’origine. Le musée de Dundo en Angola a ainsi récupéré une vingtaine d’œuvres. Sur les réseaux sociaux, du monde entier, des hommages pour son combat en faveur de « l’instauration d’un État de droit » en RDC et de son engagement pour le respect de l’identité africaine lui sont rendus.
Il avait quarante-huit ans.
Marie-Aude Priez