Ordinateurs portables, téléphones mobiles, tablettes, chargeurs solaires, écouteurs sans fil… congolais et fabriqués au Congo. Jean Mongu Bele, le fondateur, nous raconte l’aventure Okapi Us.
Parlez-nous de votre parcours s’il vous plaît.
Professeur de physique nucléaire au Massachusetts Institute of Technology (MIT) de Cambridge, aux États-Unis, j’ai poursuivi une longue carrière académique et scientifique commencée en République démocratique du Congo en 1980 à l’Institut supérieur des techniques appliquées (ISTA), où j’ai effectué mon premier cycle académique.
J’ai quitté la RDC en 1987 pour le Canada pour poursuivre mes études de deuxième cycle, d’abord à l’Université de Moncton puis à l’Université de Montréal et l’école polytechnique toujours à Montréal, ceci avant de rejoindre le Centre canadien de fusion nucléaire de Varenne, près de Montréal. En 1995, je commence le troisième cycle au MIT où j’ai obtenu mon doctorat en physique. Je suis actuellement membre du corps académique au laboratoire des sciences nucléaires de MIT.
J’ai fait mon premier pas dans l’entrepreneuriat en 2000 avec mon épouse, Léa Bele, une chercheuse d’origine haïtienne rencontrée à l’Université de Montréal. Ensemble nous avons créé la firme Arithmtech Corporation, une société de développement de logiciels de hautes technologies qui dispose d’un large champ d’application incluant l’aéronautique, la pharmacologie, la biotechnologie, la biométrie et plusieurs autres applications de base des données.
En 2019, ensemble avec mon épouse, nous avons lancé la marque Okapi (du nom de l’animal endémique des forêts tropicales congolaises) comprenant plusieurs gammes des produits, allant des smartphones, tablettes, accessoires, chargeurs solaires, ordinateurs portables et bientôt modems, onduleurs et projecteurs. Je suis le concepteur de tous ces produits qui sont tous brevetés en Europe et aux États-Unis.
Qu’est-ce qui vous a inspiré à créer Okapi ?
Le sous-développement économique de la RDC et de l’Afrique en général est le fruit du manque des structures modernes de fabrication. Nos économies sont basées sur l’économie de masse, qui consiste à exporter les matières premières dans d’autres continents à bas prix et d’importer les produits finis dérivés de nos matières premières 10, voire 100 plus chers.
Okapi a pour mission de briser cette tendance en commençant par le développement d’une industrie de hautes technologies pour hisser l’Afrique au même niveau que d’autres continents et servir d’exemple à la jeunesse congolaise et africaine. Nous avons créé Okapi pour placer une marque congolaise sur l’échiquier international de la haute technologie, ainsi du coup valoriser les capacités africaines dans les domaines de l’innovation technologique.
C’est la même inspiration que nous avions en créant Arithmtech Corporation.
Nous nous concentrons également sur la création d’opportunités d’emploi dans un secteur de haute technologie qui englobera l’ensemble du flux des capacités du développement, y compris l’approvisionnement en matériaux, la fabrication des composants entrant dans la fabrication des produits électroniques et le développement des logiciels. Le projet Okapi comprend 6 différentes phases qui sont importantes pour l’avenir de notre pays. La première phase consiste à développer un réseau de distribution à travers le monde en développant un modèle économique propre, adapté à l’Afrique, en relation avec notre secteur industriel de pointe.
La deuxième phase comprendra l’assemblage de tous nos produits en RDC d’ici la fin de l’année 2022 en utilisant les composants achetés à l’étranger. Cette phase sera suivie de la troisième qui sera axée sur la construction des unités de traitement de nos minerais sur place en RDC, ces produits traités (phase 4) serviront à la fabrication des composants nécessaires pour alimenter nos usines d’assemblage en RDC.
Ainsi, la RDC et l’Afrique n’auront plus besoin d’exporter leurs minerais pour survivre. Toutes ces industries locales seront interconnectées pour faciliter une bonne coordination de production ce qui nécessitera le besoin de contrôle de système de communication, la phase 5 consistera à la création d’un opérateur téléphonique Okapi (la RDC ne disposant pas d’une compagnie de téléphonie nationale), nous allons construire aussi un centre de données pour mieux contrôler nos données de recherche ainsi que nos secrets industriels.
Comment voyez-vous l’environnement des affaires en République démocratique du Congo et quels changements souhaiteriez-vous voir ?
Pour réussir économiquement, il est nécessaire de mettre l’accent sur l’aspect éducationnel. Le niveau d’éducation de la RDC est l’un des obstacles majeurs au développement du pays. Les écoles et les universités souffrent d’un manque criant d’infrastructures nécessaires pour former des individus compétents capables de sortir le pays du sous-développement.
Pour pallier cette situation, nous sommes en train de développer un partenariat avec les universités congolaises en vue d’adapter nos programmes aux avancées technologiques. Nous allons très prochainement signer un accord avec l’Institut national de préparation professionnelle pour recycler les jeunes gens et ensuite les utiliser dans nos différentes unités de production à travers le pays.
On ne peut pas non plus développer un pays si le système judiciaire est corrompu. Les lois pour protéger les biens et les personnes sont bafouées au grand jour et à la barbe des autorités judiciaires. Dans le cas de notre domaine industriel, le législateur congolais n’a presque rien prévu comme textes de loi pour protéger la propriété intellectuelle. La seule façon de remédier à cette situation, c’est de créer les lois et les appliquer strictement.
M&B