Originaire du nord de la France, Richard Mouthuy présente un CV qui donne le tournis. Nous avons rencontré ce globetrotter africaniste entièrement dévoué à la cause du développement.
Comment résumeriez-vous votre carrière ?
Fonctionnaire du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, j’ai pu travailler à la fois au Brésil, au Togo, au Cambodge, au Mozambique, au Congo-Brazzaville et, désormais, en République démocratique du Congo. Au fil de ma carrière, j’ai acquis une certaine expérience de l’Afrique. Ma motivation pour contribuer à la croissance de pays, quels qu’ils soient, elle, n’a jamais décliné.
Quelle mission deviez-vous remplir ces trois dernières années ?
Il m’incombait de superviser la tutelle administrative et financière de nos opérateurs. Autour des années 2000, des acteurs extérieurs ont pris en charge l’application de la politique de coopération française. On peut, à cet égard, penser à Campus France, France Médias Monde, Canal +, expertise France, France Volontaires, ou le Cirad.
Dans votre parcours, on peut remarquer une préférence africaine.
En effet ! La France y intervient avec toute sa batterie d’outils, de prêts et de dons. De plus, en Afrique, taille du continent oblige, l’espace importe davantage que le facteur du temps… Et cela sous-tend d’autres rapports entre les personnes, peut-être plus humains, plus soucieux de la cellule familiale, et qui m’intéressent beaucoup.
Comment déterminez-vous vos priorités ?
Elles dépendent grandement du contexte et des objectifs fixés. En République démocratique du Congo, on ne se soustrait pas à cette règle, et tous les appuis français s’avèrent cohérents avec les réalités locales. La République Démocratique du Congo déborde de richesses et de possibilités, pour autant les besoins restent criants. La force d’un pays se caractérise avant tout par ses ressources humaines, j’en suis intimement persuadé. Son essor en dépend. On peut le voir avec l’éducation ou la santé. Dans ces deux secteurs, la France peut faire valoir des arguments.
Bien entendu, c’est pour cela que la France appuie la formation des hauts fonctionnaires de l’École nationale d’administration, de même que celle des magistrats. Or, une bonne gouvernance ne peut advenir sans une prise en compte de la société civile. Celle-ci devient d’ailleurs un acteur clef incontournable. D’autres enjeux retiennent grandement notre attention : la protection des enfants et des minorités comme des peuples autochtones, la question d’égalité entre les sexes. La femme congolaise, à laquelle échoit un rôle primordial, doit aussi être valorisée davantage. La France apporte, en parallèle, un appui accru face aux épidémies, à la menace Ebola et à la pandémie du COVID-19. Elle soutient en particulier la formation initiale et continue du personnel, à l’instar de ces trente-deux praticiens congolais, qui ont réussi un examen difficile, et vont aller se spécialiser dans les hôpitaux de l’Hexagone.
La France accompagne en outre les bailleurs de fonds en ce qui concerne la biodiversité et la défense de l’environnement.
La France encourage plusieurs initiatives : l’augmentation des aires protégées, tel que le fonds Central African Forest Initiative, pour l’exploitation durable des forêts. Le bassin du Congo constitue le second réservoir forestier après l’Amazonie, il convient donc de veiller sur la sécurité de ce poumon vert.
Autrement, ce qu’on appelle « La France en RDC » permet de faire vivre le partenariat entre nos deux pays. Ce réseau englobe l’ambassade, les écoles françaises, l’agence française de développement, la chambre de commerce et bien sûr les Instituts français. On en dénombre quatre, à Goma, Bukavu, Lubumbashi et Kinshasa, sans oublier les alliances françaises, comme celle de Kisangani. Ces implantations diffusent la culture française et francophone, mais constituent surtout de formidables tremplins pour accompagner les artistes congolais de demain. Les opportunités avec les espaces campus France dynamisent, quant à eux, la mobilité étudiante congolaise vers la France, en particulier vers les métiers d’ingénieur, de technicien supérieur, ou de professionnel de santé. L’autre vitrine concerne les lycées René Descartes de Kinshasa, Blaise Pascal de Lubumbashi, et l’école Perenco à Muenda. Ces établissements très fréquentés proposent aux élèves une éducation française. Enfin, les Congolais parlant énormément français, l’implication dans la Francophonie et l’apprentissage intensif de la langue de Molière s’imposent.
À quelle somme votre budget s’élève-t-il ?
L’intervention de la France passe désormais principalement par les acteurs extérieurs évoqués. Ceux-ci obéissent aux orientations des tutelles ministérielles. Ici, le SCAC appuie la société civile congolaise. Il encourage notamment la formation professionnelle en hôtellerie-restauration, et aide à la préparation du mois de la Francophonie. Le budget de l’institut français s’élève à une somme confortable, grâce à nos partenariats. Cela dit, nous ne nous écartons jamais d’un iota de nos valeurs, ou des méthodes d’exigence et d’ouverture qui sont les nôtres.
Quels projets le COCAC réalisera-t-il ces deux prochaines années ?
Nous allons renforcer le développement des établissements d’enseignement français et promouvoir le label « France éducation ». En parallèle, nous comptons faire émerger de nouveaux talents congolais. Je crois beaucoup en l’ascenseur social des hussards de la République, dans les pays occidentaux cette idée semble un peu compliquée à réaliser, mais, ici, cela prend tout son sens. Si je peux modestement contribuer à ce qu’un seul Congolais en bénéficie, j’aurai réussi mon mandat.